Par Françoise Dargent

24/06/2010 | Mise à jour : 16:06 Réagir

La Saga Mendelson - D'Odessa à New York, Fabrice Colin raconte la traversée du XXe siècle par une famille juive.

N'en déplaise à l'adage populaire, Fabrice Colin a bien choisi sa famille. Elle se nomme Mendelson et son histoire, qui court sur un siècle, remplit trois bons volumes dont le dernier vient juste de sortir. Dans La Saga Mendelson, le narrateur conte le parcours échevelé d'une famille juive de 1895 à nos jours, d'Odessa à New York en passant par Vienne et Johannesburg. Il croise son récit avec des bribes de journal écrit à l'époque des faits par le patriarche, les archives familiales et les témoignages des descendants ou de protagonistes interviewés a posteriori. Il est frappant de voir combien le destin de cette famille est étroitement lié à l'histoire. Les photos confiées au narrateur confirment cette proximité. À ce stade de l'article, il est cependant nécessaire d'apporter une petite précision : la famille Mendelson est une invention, l'invention géniale d'un auteur qui parvient ainsi à incarner la grande histoire pour mieux l'expliquer aux adolescents.

Les jeunes lecteurs connaissent en effet bien Fabrice Colin, auteur prolifique de romans teintés de fantastique. Cet ouvrage-là arrive dans leur bibliothèque comme un ovni dans une cour de collège. Ambitieux et détonnant. Le Seuil qui l'édite a gommé le mot jeunesse sur la couverture. Les lycéens apprécieront et les parents ne se sentiront pas exclus. Mais qui sont donc ces fameux Mendelson, objet de toutes ses attentions ? À l'origine, un couple, Isaac et Batsheva, ainsi que leurs deux enfants David et Leah, tous deux nés à Odessa, au XIXe siècle finissant. La famille est prospère grâce à la petite entreprise d'horlogerie paternelle. L'entrée des deux enfants dans la vie se place effectivement sous le signe de la félicité.

Premiers pogroms

Mais en 1905, les premiers pogroms contre les Juifs les contraignent à abandonner la Russie pour rejoindre Vienne. Une existence itinérante débute. Elle marquera la famille à jamais. En 1916, au décès du père, le trio émigre en Amérique où David, l'artiste, trouve une place de décorateur et de pseudo-scénariste. Mariage, naissance, mort se suivent au fil des pages qui embrassent le destin d'une famille en perpétuelle croissance. Les enfants naîtront peu avant la crise de 1920, les petits-enfants vivront la guerre du Vietnam, les suivants voyageront ici et là, au gré des événements internationaux. Ils seront photographes, engagés dans l'humanitaire et certains nourriront leur fibre pacifiste en s'impliquant dans les combats de leur temps. À la fin du troisième et dernier tome, on suivra la cinquième génération, adepte du groupe Nirvana et rêvant de travailler pour les studios Pixar.

Tout au long du récit, Fabrice Colin adopte le ton neutre du narrateur. Il a le souci propre aux auteurs habitués à écrire pour la jeunesse de situer un contexte en économisant ses lignes. Il en résulte une sobriété étonnante pour un roman qui parvient pourtant à embarquer pleinement les jeunes lecteurs dans le tourbillon de l'histoire.

La Saga Mendelson (en trois tomes) de Fabrice Colin, Seuil, 292 p, 16,50 €. A partir de 14 ans.

LA SAGA MENDELSON

Partager cet article